LES
INSOUMIS DE WHIM
par
Franck Cassilis
An
332 de l'Union Galactique (U.G.)...
Système
de Bantrill : un des innombrables systèmes de l'Union Galactique.
Conquis par les colons pangéens au milieu du deuxième siècle de
l'U.G., il possède six planètes tournant autour de l'étoile de
Bantrill. La deuxième planète, nommée à l'origine Urvaé,
abritait deux races Non-Humaines depuis toujours ennemies, les
whimiens et les ojokiens.
Vers
l'An 5 de l'U.G., les ojokiens ont chassé les whimiens de la planète
Urvaé. Ils ont été contraints de fuir dans l'espace avant
d'échouer sur la ceinture d'astéroïdes. Les ojokiens ont renommé
Urvaé, Ojok, une fois que tous les whimiens l'eurent désertée.
Après
la conquête pangéenne et l'intégration à l'Union Galactique, le
conflit ancestral entre whimiens et ojokiens a connu une longue
trêve. Mais depuis le déclenchement de la guerre civile entre Adar
Jool et Sid Hogn, les deux plus puissants sénateurs de la Diète
Insterstellaire, le conflit est en passe de reprendre, Ojok cherchant
à annexer la Ceinture de Whim...
(Extrait
du Manuel de Civilisation Stellaire, huitième édition révisée –
ouvrage collectif rédigé en pangéen commun sous la direction de
Tram Gollah, Professeur émérite des Universités du Pangé Unifié).
Sur
Jibbsoh, l'astéroïde majeur de la Ceinture de Whim, un groupe se
déplaçait prudemment. Ils étaient quatre dans des spatiandres
particulièrement vétustes. Ces
humanoïdes à la peau argentée, tous chauves et imberbes, étaient
des whimiens. Le groupe se composait de trois
hommes et d'une femme. Derrière
leur casque à la visière usée, leurs
traits étaient tendus à l'extrême.
Enfin
ils touchèrent au but. Celui qu'ils attendaient allait se poser sur
un plateau rocheux, le seul de ces alentours escarpés. Quand ils
virent le vaisseau avancer vers le plateau, ils ne purent contenir
leur déception. Il s'agissait d'un misérable glisseur.
-
Asati, c'est une blague, rassure-moi, fit un des trois grands
gaillards à la jeune femme.
Il
s'était adressé à Asati grâce au système radio vétuste de leur
spatiandre. D'ailleurs celui-ci ne fonctionnait qu'à un faible
volume et en grésillant, comme s'il allait bientôt lâcher.
-
Il ne faut pas se fier aux apparences Vandong, répondit-elle. Notre
Vénérable Bonze m'a certifié que cet humain était l'homme de la
situation.
Ses
trois acolytes ne rétorquèrent rien. Ils pensaient que cette
mission ordonnée par le Grand Bonze de Dwahran était une erreur.
Leur peuple pouvait résister sans aide extérieure. Mais ils étaient
obligés d'accepter l'autorité suprême des Bonzes et donc
d'accompagner la plénipotentiaire Asati pour cette transaction, même
s'ils avaient souhaité qu'il en soit autrement.
Asati
se mit en route vers le plateau tandis que le glisseur se posait. Ses
trois acolytes lui emboitèrent malgré tout le pas.
Serro
Warfin sortit de son glisseur. C'était un humain de trente cinq ans
imberbe et châtain, sec de carrure. Il exerçait le métier de
contrebandier stellaire depuis dix ans standards déjà. Des tas de
rumeurs courraient sur lui, forgeant sa légende, notamment à propos
de son astronef trafiqué illégalement pouvant entrer en hyperespace
comme le plus sophistiqué des vaisseaux militaires de l'Union. La
plupart de ces rumeurs prétendaient qu'il l'avait acquis en
s'aventurant au-delà de la galaxie dans le mythique territoire des
Xoogs, créatures impitoyables qui menaçaient depuis un siècle
l'œkoumène stellaire.
C'était
pour cela que Vandong avait été déçu quand il avait vu ce
ridicule glisseur se poser sur Jibbsoh. Le whimien était à présent
persuadé que la réputation de l'humain reposait sur un mensonge.
Enfin
apparurent les clients avec qui Serro avait rendez-vous. Il fut
abasourdi quand il vit leur spatiandre. Si le sien datait un peu, à
côté du leur il paraissait à la pointe de la technologie. Comment
pouvaient-ils se déplacer dans l'espace avec une combinaison
pareille ?, se demanda le contrebandier avant de brancher son
trad'universel.
-
Bonjour messieurs... et dame, fit Serro en apercevant Asati au milieu
des mâles whimiens.
-
Nous sommes heureux de vous rencontrer, Serro Warfin, répondit Asati
depuis la radio défaillante de son spatiandre. Vous êtes notre
dernier espoir.
Sa
voix était mélodieuse et étrange. C'était la première fois que
Serro entendait du whimien, une langue ancestrale datant de bien
avant les Temps Galactiques. Dans le même temps, la voix mécanique
de son trad'univ retranscrivait en pangéen commun le discours. Les
whimiens possédaient eux aussi un trad'univ' incorporé dans leur
combinaison spatiale.
-
Vous n'avez pas le chargement, dit alors Vandong. Il ne peut se
trouver dans ce misérable coucou. Vous êtes un imposteur !
Serro
arbora un sourire ironique, agaçant son contradicteur.
-
Veuillez me suivre jusqu'à mon misérable coucou, dit-il. Vous
verrez bien qui est l'imposteur.
Les
quatre whimiens attendaient anxieusement autour de Serro. Le
contrebandier fit coulisser une sorte de long et plat tiroir du
coffre de son engin. Il en extirpa précautionneusement une imposante
plaque d'anthracite qu'il posa entre lui et les whimiens intrigués.
Puis Serro appuya sur un bouton tactile invisible situé à une des
extrémités de la plaque d'anthracite. La plaque s'ouvrit révélant
un improbable contenu. Quatre rangées de pièces détachables
parfaitement alignées. Serro prit une pièce dans chaque rangée
qu'il emboita sans difficulté. À la fin, il avait en main un
désintégrateur standard avec sa batterie rechargeable à l'infini.
-
Vous en avez une quarantaine comme ça, dit Serro tout sourire. Il y
a un deuxième niveau sous la valise. Mais avant, le paiement.
-
Attends l'humain, fit Vandong. Qui nous dit que ta camelote marche ?
Serro
le fixa avec un air indéfinissable. Puis il visa un gros rocher
derrière eux. Un laser jaune partit qui pulvérisa la pierre.
-
Mais je peux les reprendre aussi et on en reste là, conclut le
contrebandier en faisant mine de tout remballer.
-
C'est bon contrebandier Warfin, dit alors Asati. On les prend. Peu
importe le prix. N'est-ce pas Vandong ?
Mais
ça ne semblait pas aussi simple. Les whimiens discutaient vivement
entre eux, tenant un Serro agacé à l'écart. Ils ne voulaient pas
payer, sous prétexte que la livraison ne respectait pas
l'intégralité du contrat. Il avait été prévu qu'au moins le
double soit livré d'après Vandong. Quel culot de leur part ! se
disait Serro. C'était miraculeux déjà d'avoir pu acheminer tous
ces désintégrateurs.
Actuellement
la Ceinture de Whim subissait un blocus de la part des ojokiens,
Non-Humains à puissante carrure et à la tête évoquant des tapirs
carnivores. Ce peuple du système stellaire de Bantrill, rattaché de
force à l'Union Galactique en 186 du calendrier standard, tentait de
retrouver un peu de sa superbe en conquérant la Ceinture de Whim,
située à quelques encablures cosmiques seulement de leur planète.
La guerre civile régnant dans la galaxie favorisait leur projet de
conquête de ce système.
Il
y avait trois siècles standards, les whimiens avaient été obligés
d'abandonner leur planète d'origine, sous la pression terrible des
conquérants ojokiens.
Les
whimiens avaient fui, tout du moins les survivants de l'atroce guerre
entre les deux peuples, à bord d'un vaisseau spatial qui s'échoua
au bout de deux ans d'errance cosmique sur la ceinture d'astéroïdes.
Dans ce système, le vol spatial n'en était qu'à ses prémisses et
il était maîtrisé seulement par les whimiens. Mais leur culture
d'alors leur interdisait de développer une technologie militaire
conséquente.
C'était
un peuple à part, ayant créé une civilisation pacifique dans le
continent nord de la planète, où les savants-philosophes dénommés
bonzes étaient hautement vénérés. Ils avaient déplacés leur
brillante civilisation sur la ceinture d'astéroïde du système,
malgré les difficultés matérielles – comme en témoignaient la
vétusté de leurs spatiandres – hors de portée de leurs ennemis
héréditaires.
Or
depuis une dizaine d'années, les ojokiens les menaçaient à
nouveau. Ayant enfin pu maîtriser le vol spatial, et profitant de la
désorganisation de l'Union Galactique suite à la guerre civile qui
faisait rage dans tous les systèmes stellaires, les ojokiens
voulaient envahir la Ceinture de Whim.
Ils
avaient perdu les premiers combats contre ces whimiens plus
belliqueux que leurs ancêtres chassés de leur planète d'origine.
Mais les ojokiens avaient organisé un blocus de la ceinture
d'astéroïdes que seuls de rares contrebandiers comme Warfin
parvenaient à déjouer.
Soudain
un point lumineux à l'horizon de Jibbsoh alerta Serro. Il s'immisça
dans la discussion des whimiens.
-
Bande d'imbéciles !, leur lança-t-il. Vous avez trop tardé. Les
ojokiens débarquent !
-
Ce n'est pas grave, fit Vandong en lui adressant un regard méprisant.
Nous avons les désintégrateurs. Vu le nombre restreint que vous
nous avez livré, et le risque encouru pour si peu, nous les prenons
sans payer. Nous nous séparons là, monsieur Warfin. Montez vite
dans votre coucou pour avoir une chance d'échapper aux ojokiens. Et
Adieu.
-
Vandong !, s'indigna Asati. Tu fais honte aux whimiens ! Que dirait
notre Vénérable Bonze s'il te voyait faire ?
-
C'est la guerre Asati, lui répondit froidement son compatriote.
L'enseignement du Grand Bonze a ses limites. On ne peut plus se
permettre d'être tendres à présent.
Serro
ne dit rien, mais fixa un moment le Vandong. Très bien, s'il voulait
jouer à ça... Les whimiens, après avoir pris l'imposante plaque
anthracite contenant les armes lasers, s'en retournèrent vivement au
milieu des vallons escarpés et sombres de l'astéroïde. Seule Asati
restait indécise. Serro la prit alors par le bras :
-
Venez avec moi dans mon appareil, lui intima-t-il. Vos amis ne savent
pas qu'ils sont condamnés. Croyez-moi, Asati, vous faites le bon
choix en me suivant et en me soutenant.
La
whimienne se mordait les lèvres d'indécision. Puis elle choisit
d'un coup. Elle monta à l'arrière du glisseur du contrebandier.
Celui-ci décolla au moment où le vaisseau ojokien apparaissait
au-dessus du plateau.
L'astronef
typique d'Ojok gardait cette apparence archaïque, tourmentée et
barbare des nefs planétaires des temps pré-galactiques. Mais le
vaisseau stellaire restait doté de bonnes performances. Il pouvait
naviguer aisément dans le système interne de Bantrill, dont la
Ceinture d'Astéroïdes de Whim marquait la limite.
Bref,
c'était un vaisseau suffisamment redoutable. Mais Serro était un as
du pilotage, comme le vérifia Asati. Le contrebandier fit louvoyer
son appareil entre les crevasses profondes de Jibbsoh. Il était une
cible moins facile pour l'astronef ojokien qui le pourchassait à
coups de lasers. Serro gardait son sang-froid. Il avait repéré la
fameuse galerie souterraine – le Grand Boyau comme l'appelaient les
whimiens – qui lui permettrait d'échapper à leurs poursuivants.
Ce
Grand Boyau avait été construit à l'origine par les pionniers
arrivés sur l'astéroïde. Ils avaient vécu dans cette grande
galerie avant de construire leur vaste cité souterraine faisant
perdurer leur civilisation après le cataclysme de la Grande Fuite.
La
whimienne n'en revenait pas. Comment avait-il connaissance d'un
endroit aussi secret ? Même les ojokiens ignoraient son existence.
Asati voulut questionner Serro à ce sujet. Il ne lui répondit pas,
concentré dans son pilotage entre les pics abrupts. Il avait ôté
son casque. Il ne pouvait pas avoir accès à son trad'univ' et ne
comprenait rien à ce qu'elle disait.
Serro
entama la manœuvre pour entrer dans le Boyau. Le vaisseau ojokien le
suivait de près... Les premiers mètres, le Boyau était
suffisamment large pour laisser passer le gros vaisseau ojokien. Puis
la galerie souterraine se rétrécissait soudainement. Le glisseur
passa aisément, mais l'astronef ojokien heurta violemment les parois
resserrées. Cette partie de la galerie ne s'écroula pas mais prit
feu instantanément. Le glisseur continua à foncer. Le Boyau
devenait tortueux à présent. Au détour d'un énième virage, Serro
posa son glisseur sur le sol de poussière, laissa les phares du
petit vaisseau allumé et se tourna vers Asati en remettant le casque
de son spatiandre.
Ils
étaient sauvés, à l'abri de l'incendie sous la galerie, mais Serro
n'en avait pas fini avec les whimiens.
-
Je sais que vos compatriotes vont passer par là pour retourner dans
leur cité souterraine, dit-il à Asati par le biais du trad'univ'.
-
Vous êtes bien renseignés? Que cherchez-vous, Serro ?
-
À me faire payer la livraison !
-
Vous n'avez aucune chance de récupérer votre dû, malheureusement.
Vandong et ses affidés ne vous feront pas de cadeau s'ils vous
croisent. La situation est tellement désespérée ici depuis que les
ojokiens ont repris leurs projets de conquête... Tout ça à cause
de cette guerre civile... Les ojokiens ont choisi le parti d'Adar
Jool et notre peuple celui du Patricien Sid Hogn. Pour notre malheur,
les pro-Jool sont en train de gagner de nombreuses batailles
stellaires. Les ojokiens en profitent pour essayer de se rendre
maître de tout ce système. Nous ne faisons que nous défendre. Nous
ne voulons pas vivre une autre Grande Fuite...
Asati
s'était soudainement tue. Au travers de la vitre du glisseur de
Serro, elle avait vu déboucher dans la galerie ses trois comparses.
Sans dire un mot, le contrebandier sortit de son glisseur à leur
rencontre. Asati lui emboita le pas avec inquiétude.
-
Que signifie ceci !, éructa Vandong malgré son émetteur
défectueux. Comment connaissez-vous ces galeries ?
-
Allons Vandong. Je ne vous révèlerais pas mes secrets. Mais sachez
que je ne vous lâcherais pas. Je sais où vous allez. À l'entrée
de votre cité souterraine de Dwahran, juste après le Grand Boyau.
Mais êtes-vous sûr aujourd'hui de pouvoir y arriver ?
-
Que racontes-tu, l'humain ?, grogna Vandong.
-
Il y a un autre vaisseau ojokien qui vous attend à la sortie. C'est
dommage, il ne vous restait ensuite que quelques centaines de mètres
à parcourir à découvert avant d'atteindre votre cité souterraine
que les ojokiens cherchent en vain...
-
Quoi ! Tu nous as trahi !, rugit Vandong.
-
Non, mais j'ai... comment dire... des moyens qui me permettent de
savoir qu'une embuscade à la sortie du Grand Boyau se prépare.
-
Nous sommes perdus, dit un des acolytes de Vandong.
-
Pas tout à fait, reprit Serro. Il reste une dernière solution. Mais
je ne l'utiliserais que si je suis payé.
-
Quelle infamie..., cracha Vandong étouffé par la colère.
-
Vandong !, dit alors Asati. Paye-le, bon sang ! Grâce à lui, nous
avons des armes puissantes pour lutter face aux ojokiens.
Quelques
minutes plus tard, un des acolytes de Vandong rangeait la mallette de
transaction néo-numérique. Serro remettait avec satisfaction sa
disquette de crédit bancaire dans une de ses poches intérieures. Il
avait été payé.
-
Bien, dit-il triomphalement. Veuillez à présent prendre place dans
le glisseur.
Ils
aperçurent enfin la sortie du Grand Boyau. Ils se dissimulèrent
près de celle-ci. Ils ne virent d'abord rien, à part le cosmos
au-dessus d'eux. Soudain apparut un drone de surveillance balayant
les alentours. Puis il disparut rapidement derrière une barrière de
rochers.
-
L'humain a raison, chuchota vivement Vandong. On nous attend en
embuscade. Si on était sorti du Grand Boyau, on aurait été trucidé
dans l'instant.
Mais
Serro ne l'écoutait pas. Il s'était penché sur sa montre-bracelet.
Il dit :
- Antor, à toi de jouer cette fois.
-
Ah ! On a besoin de mon aide aujourd'hui ?, retentit depuis la
montre-bracelet une voix monotone robotique où se mêlait un
improbable ton ironique.
Peu
après, surgit de l'espace un astronef blanc à l'apparence élégante
et redoutable. Au même moment, sur la gauche, des tirs lasers
visèrent le Antor 1700 de Serro. Mais son bouclier d'auto-défense
résista aux assauts ennemis. Il contre-attaqua. Des lasers-bombes,
sortes de grosses boules rougeâtres, sortirent de l'avant du
vaisseau et s'abattirent sur l'astronef ojokien en embuscade. Une
explosion silencieuse s'éleva dans l'espace, tandis que le Antor 1700 se posait à l'entrée de la galerie.
-
Vous nous aviez caché à dessein votre véritable vaisseau, dit
médusée Asati. Pourquoi ?
-
L'effet de surprise, répondit le contrebandier. Il faut toujours
avoir un coup d'avance dans mon métier.
Ils
se dirigèrent ensuite à l'entrée de leur cité souterraine de
Dwahran qu'on ne distinguait pas depuis la surface rocheuse de
Jibbsoh. Sur leur gauche, l'astronef ojokien avait été entièrement
pulvérisé. Il n'y avait aucun survivant. Serro gara son glisseur
dans son astronef après que tous en furent sortis. Puis il se mit au
bas de la rampe d'accès grande ouverte de son vaisseau. Les trois
whimiens n'accordèrent pas le moindre regard au contrebandier. Ils
se postèrent devant un rocher et attendirent que le sas d'entrée de
la cité souterraine apparaisse après avoir pianoté un code secret
sur un clavier dissimulé dans la roche.
Seule
Asati resta à parler avec le contrebandier.
-
Je dois vous remercier Serro. Vous nous avez sauvés la mise, malgré
l'attitude inélégante de mes comparses.
-
Ça pour être inélégants, ils l'ont été. Cependant, j'ai
l'habitude de clients réticents dans mon métier. Surtout ces
derniers temps...
-
Oui. La tension est rude dans tous les systèmes de l'Union. Dix ans
de guerre civile entre les sénateurs Sid Hogn et Adar Jool ont tout
déstabilisé, même ici.
-
Je n'ai que faire de tout ce cirque, Asati... En tout cas, bonne
chance dans votre lutte contre les ojokiens.
-
Faites attention, Serro. La guerre civile risque un jour de se
rappeler à vous. Même nous, avons été obligé de faire un choix.
Le
contrebandier lui sourit puis pénétra dans son vaisseau. Il retira
avec joie son spatiandre. Serro fut accueilli par l'Intelligence
Artificielle de l'astronef antorien de modèle Antor 1700. Il était
illégal qu'un simple citoyen comme lui possède un vaisseau aussi
sophistiqué pouvant voyager en hyperespace. Mais grâce à cette
technologie de pointe, il échappait à toutes les polices de
l'Union.
Personne
ne savait comment il avait acquis l'astronef fabriqué par une race
de Non-Humains parmi les plus brillantes, aujourd'hui quasiment
disparue, les antoriens. Serro se refusait à le révéler à
quiconque. Tout juste avait-on vu apparaître une furtive grimace de
souffrance sur son visage devenu totalement fermé les rares fois où
la question lui avait été posée.
Le
contrebandier se positionna dans le cockpit et enclencha la manœuvre
de décollage.
-
Bien joué tout à l'heure, Antor. Tu leur as mis une sacrée
raclée.
-
Je n'ai pas de mérite Serro, retentit la voix robotique de l'I.A. Tu
t'es, d'une part, bien renseigné sur l'histoire de Whim, notamment à
propos de l'existence du Grand Boyau. D'autre part, leur technologie
stellaire n'est pas très développée par rapport aux autres mondes
que l'on a l'habitude de côtoyer. Leur blocus spatial est d'ailleurs
facile à franchir. D'autant plus que c'est toi qui m'a demandé de
communiquer, soi-disant par inadvertance, l'endroit où les whimiens
déboucheraient, révélant aux ojokiens l'emplacement de Dwahran.
Quel fourbe tu fais !
-
Allons !, sourit Serro. N'exagère pas. Le plan s'est parfaitement
déroulé. J'ai été payé. De plus, je t'ai demandé, quand j'étais
dans le glisseur avec Asati, de brouiller les ondes radio pour ne pas
qu'ils renseignent leurs congénères sur l'endroit où se trouve
Dwahran. Et comme tu as dégommé l'appareil ojokien, le secret n'a
pas été éventé. Mais le restera-t-il ? Vue la facilité avec
laquelle on a découvert son emplacement, d'autres le trouveront.
Pareil pour le Grand Boyau... Allez, on décolle ! Tu me sortiras mes
cigares et mon whisky, une fois en hyperespace...
-
Oui. Comme d'habitude.
-
Heureusement que le Grand Bonze nous a dit qu'on pouvait faire
confiance à ce satané humain, lâcha Vandong une fois qu'Asati les
eut rejoints.
-
Grâce à lui, on a quand même des désintégrateurs pour mener une
guérilla efficace dans la Ceinture d'astéroïdes, lui répondit
Asati. Même si les ojokiens semblent savoir où se situe l'entrée
de Dwahran, nous pourrons créer une unité d'élite chargée de les
combattre désintégrateurs au point. Ils ont trouvé à qui parler
maintenant !
Vandong
dut reconnaître qu'Asati disait vrai. Puis une fente se fit dans la
roche de l'astéroïde. Un ascenseur mécanique un peu daté se mit à
la hauteur des whimiens. Ils s'y engouffrèrent. Dans le même temps,
l'astronef du contrebandier décollait de Jibbsoh.
-
Je me demande si ce Serro Warfin réussira à rester à l'écart du
grand conflit interstellaire, fit Asati tandis que les pans de
l'ascenseur souterrain se refermaient.
Peu
après, le Antor 1700 de Serro Warfin pénétrait dans
l'hyperespace, illuminant pendant une fraction de seconde l'immensité
du cosmos.
FIN
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